Changements climatiques : Quelle assurance pour l'avenir ?

21/03/2024
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Les impacts des catastrophes naturelles telles que les inondations, les dommages aux structures comme les murs fissurés, ainsi que les bris de vitres, sont de plus en plus fréquents en raison du changement climatique. Dans ce contexte, l'agéa, syndicat représentatif des agents généraux d'assurance, a mis en place en octobre 2022 un groupe de travail sur le climat afin d'examiner les défis assurantiels liés aux risques climatiques. Les résultats de ce groupe de travail ont été publiés et témoignent du défi que représente la transition écologique. Publié en janvier 2024, ce rapport expose 17 propositions visant à adapter le secteur de l'assurance au dérèglement climatique. Son ambition est de maintenir une assurance dans toutes les zones et tous les territoires français. Ainsi, la fédération propose le maintien d'une offre en multirisque habitation (MRH) et en multirisque professionnelle (MRP) sur l'ensemble du territoire afin de bénéficier du régime d'indemnisation des catastrophes naturelles. Toutefois, l'agéa précise que ces mesures devront être adaptées dans les territoires ultramarins en raison de leur situation spécifique.


 

Trouver de nouvelles sources de financement 

Face à l'augmentation des sinistres en France, il est impératif de mobiliser de nouveaux financements. On pense, aujourd’hui, que la moitié des dommages seraient attribuables au dérèglement climatique, un pourcentage qui devrait encore croître pour représenter environ 75% d'ici 2050. Ces dommages, causés par les événements naturels pourraient ainsi atteindre 143 milliards d'euros sur la période 2020-2050, contre 74,1 milliards d'euros sur la période 1989-2019, soit une augmentation de 93%. La croissance serait plus significative pour la sécheresse (+ 215%) que pour les inondations (+ 87%) et les tempêtes (+ 46%).

Actuellement, le "fonds Barnier", ou fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM), soutient les mesures de prévention ou de protection des personnes et des biens exposés aux risques naturels majeurs. Ce fonds peut être utilisé pour financer les dépenses d'investissement des collectivités territoriales en réalisant des études, des travaux ou des équipements de prévention ou de protection contre les risques naturels. Il peut également financer des actions d'information préventive sur les risques majeurs, contribuant ainsi à sensibiliser à ces risques, précise le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Cependant, tel qu'il est actuellement structuré, ce fonds risque de ne pas être suffisant dans les années à venir. L'agéa envisage donc sa revalorisation ainsi que l'inclusion des risques liés à l'érosion dans son champ d'application.
 

Analyser et Définir les Risques de Manière Plus Précise

L'agéa recommande également la mise en place d'un diagnostic de vulnérabilité aux risques naturels, pour chaque bien immobilier et foncier. Ce diagnostic serait établi sur le même modèle que celui sur la performance énergétique. Le score obtenu pourrait alors influencer les conditions d'accès aux contrats d'assurance pour les particuliers et les professionnels.

L'agéa plaide également en faveur de la création d'un observatoire sur l'assurabilité des risques climatiques, destiné à centraliser les données sur la sinistralité et l'offre d'assurance à l'échelle nationale. En effet, il n'existe pas encore de définitions uniformes des zones à risques. En conséquence, un assureur pourrait déclarer une zone comme étant à risque d'inondations, tandis qu'un autre pourrait ne pas la considérer comme inondable. Un observatoire global permettrait donc d'harmoniser ces informations.

 

Réajuster le système assurantiel actuel

Toutes ces recommandations visent à combler les lacunes du système assurantiel actuel, car celui-ci peine encore à encadrer les phénomènes tels que le retrait-gonflement des argiles, les risques forestiers et le recul du trait de côte. On constate aussi un manque de solutions d'assurance pour plusieurs secteurs industriels, comme le photovoltaïque ainsi que les nouveaux matériaux de construction et les matériaux recyclés.

La préservation du régime d'indemnisation des catastrophes naturelles (Cat Nat) demeure une autre priorité. En effet, le régime Cat Nat, en vigueur depuis 1982, ne sera plus adapté à l'augmentation attendue de la sinistralité naturelle dans les années à venir. Tout comme pour le fonds Barnier, le régime Cat Nat risque de devenir insuffisant face aux évolutions à venir. Selon la Caisse centrale de réassurance, le régime 'Cat Nat' ne disposera plus de réserves suffisantes pour couvrir les seuls épisodes de sécheresse d'ici à 2040.

Le gouvernement travaille déjà sur une nécessaire évolution du secteur assurantiel. Bruno Le Maire, ministre de l'Économie, et Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique, ont lancé une mission sur l'assurabilité des risques climatiques en mai 2023. 

Selon les estimations de France Stratégie, pour atteindre les objectifs de l'Accord de Paris de 2015, un investissement annuel de 66 milliards d'euros sera nécessaire jusqu'en 2030. La moitié de ce montant sera prise en charge par les finances publiques, tandis que le reste devra être assumé par le secteur de l'assurance pour relever les défis actuels et futurs. Il est clair que l'augmentation des primes d'assurance et la mobilisation des fonds publics ne seront pas suffisantes en elles-mêmes pour répondre à ces défis.