Assurer son entreprise contre les risques nucléaires

30/03/2022
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L’actualité n’est pas réjouissante en raison de la guerre en Ukraine. Dans ce contexte, cette guerre fait notamment ressortir et resurgir des craintes d’incident, voire de guerre nucléaire. Or, qui donc peut s’estimer à l’abri, eu égard à l’étendue potentielle des dégâts que provoquerait une telle guerre ? Les entreprises belges sont-elles assurées contre ce type de risque ? 

En réalité, force est de constater que les entreprises ne sont pas couvertes face au risque nucléaire, ce dernier étant très souvent exclu des polices d’assurance traditionnelles telles les assurances incendie par exemple. Néanmoins, grâce à une formule originale de couverture du risque nucléaire, il est tout à fait possible pour les entreprises comme pour les particuliers de solliciter une telle indemnisation. 

UNE COALITION DE DOUZE ASSUREURS BELGES.

Bien qu’encore trop méconnue, une police d’assurance a été conçue, par la coalition d’assureurs du monde entieren vue de couvrir le risque nucléaire. En Belgique, ce contrat vient couvrir le risque d’incident nucléaire sur le sol belge et ce, à hauteur de 1,5 milliards d’euros en cas de réalisation du risque au sein d’une centrale nucléaire belge. 

Alors même que le risque nucléaire n’est prévu individuellement chez aucun assureur, il est néanmoins couvert grâce à ce regroupement de douze assureurs tels Axa, AG Insurance ou encore Ethias, etc., tous rassemblés au sein du Syban, Syndicat belge d’assurances nucléaires

A l’heure actuelle, le Syndicat ne comprend qu’une dizaine de clients, pour la majorité des entreprises actives dans le nucléaire telles que l’Institut national des Radioéléments (IRE) ou encore le Centre d’étude de l’énergie nucléaire à Mol, etc. A ce titre, il est bon de préciser que, selon la taille du client, la couverture est plus ou moins étendue car le risque n’est évidemment pas le même. Ainsi :

  • Pour l’IRE, considéré comme un « petit client », la police d’assurance prévoit une prise en charge pouvant aller jusqu’à 80 millions d’euros
  • En revanche, la prise en charge peut atteindre 1,2 milliards d’euros concernant Engie-Electrabel et les centrales qu’il assure et ce, couvert en quasi-totalité par le Syban (pour les ¾, le reste étant pris endossé par la mutuelle européenne ELINI (European Liability Insurance for the Nuclear Industry), co-assureur. Mais ce n’est pas tout puisqu’un fonds de solidarité internationale verse également la somme de 300millions d’euros en sus de ces 1,2 milliards. 

Bien que cette somme puisse paraitre exorbitante, en réalité il y a de grandes chances pour qu’elle se relève insuffisante en cas de réalisation du risque et requiert alors l’intervention de l’Etat, cela d’autant plus quand on sait que le coût généré par les inondations de 2021 était supérieur à 2,5 milliards d’euros et qu’il était pris en charge par les régions et les assureurs. 

L’ETENDUE DE LA COUVERTURE.

Cette police d’assurance propose une couverture extrêmement intéressante en cas d’incident puisque sont indemnisés :

  • Les dommages matériels tels que les dégâts ayant abîmés des sites, des immeubles, etc.
  • Les dommages corporels tels que des blessures, des hospitalisations, etc. 
  • Les dommages non matériels comme les pertes d’exploitation pour les entreprises notamment liées à une diminution ou un arrêt de l’activité. 
  • Les dégâts environnementaux tels que la pollution d’un cours d’eau par exemple.  
  • Ainsi que les séquelles survenant dans les 30 ans suivants l’incident. 

Aujourd’hui, la Belgique est prête à réagir en cas de réalisation du risque nucléaire sur son sol et ce, notamment grâce à la création d’un site internet, en veille actuellement mais activable en cas de catastrophe. Ce site est destiné à permettre à toute personne victime de l’incident de se déclarer et de décrire les dommages subis. 

Un véritable travail de tri de l’ensemble des habitants et des sociétés a été effectué en amont afin d’optimiser au maximum leur répartition entre les différents assureurs membres du Syban. Ces derniers seront alors amenés à déterminer le montant des dommages et intérêts dus à chacune des victimes, indemnités payées ensuite par le Syndicat. 

LA VOLONTE DE NE PAS REPRODUIRE L’ERREUR DE FUKUSHIMA

Dans la mesure où le risque de tsunami est réel concernant une centrale nucléaire, il est souvent très compliqué de convaincre les assureurs de couvrir un tel risque. C’est ainsi que si Tchernobyl était couvert par l’URSS, Fukushima n’était pas assuré. 

En effet, le risque à assurer est minime alors même que la couverture est gigantesque. C’est pour cette raison qu’un mécanisme d’alliance internationale a été mis en place de manière à partager le risque entre plusieurs assureurs étrangers

SI LES INCIDENTS NUCLAIRES SONT COUVERTS, LA GUERRE NUCLAIRE, ELLE, NE L’EST PAS.

Il est intéressant de préciser que cette coalition emporte une certaine solidarité entre les membres qui la composent, à savoir des assureurs présents dans une vingtaine de pays tels que la France, l’Allemagne mais également la Finlande, etc. On compte également parmi eux l’Ukraine. Ainsi, en cas d’incident nucléaire dans un des pays membres, un soutien financier sera apporté par les autres États au Syban. 
En revanche, si l’incident nucléaire est couvert, tel n’est pas le cas de la guerre nucléaire, c’est à dire des frappes et des dommages nucléaires résultant d’un conflit armé. Or, dans le contexte actuel et notamment avec les attaques russes des centrales nucléaires ukrainiennes, cela aurait été problématique si la catastrophe n’avait pas été évitée de justesse. En effet, les dégâts n’auraient pas pu être indemnisés, tout comme des éventuelles retombées radioactives dans des États membres du Syban